La désaffection vis-à-vis de la politique telle qu’elle est menée aujourd’hui se traduit par une méfiance accrue vis-à-vis de ceux qui prétendent agir au nom du peuple. Les prérogatives qu’ils s’accordent volontiers semblent d’autant plus contestables qu’elles sont souvent proportionnelles à l’impuissance dont ils font preuve pour traiter les problèmes institutionnels, sociaux et économiques rencontrés par les citoyens. En un mot, le peuple ne se reconnaît plus dans ses représentants. La défiance qui s’est installée condamne même certains à entreprendre des actions spectaculaires et désespérées pour défendre leurs intérêts. Bien plus, des forcenés n’hésitent pas à user de la violence aveugle contre des élus pris pour des boucs-émissaires. Il serait pourtant naïf de ranger ces phénomènes dans la rubrique des faits divers : ils constituent le symptôme d’un malaise grandissant. De tels comportements criminels ne peuvent que jeter l’effroi et souligner l’ampleur d’un malentendu. Car, la représentation est une procédure fondamentale de l’action politique. Prétendre s’en passer ne pourrait entraîner qu’une régression vers des méthodes nihilistes. Il s’agit donc de faire la part des choses entre ceux qui aspirent à redonner du sens à la représentation et les irresponsables qui prétendent jeter le bébé avec l’eau du bain. Il faut cesser de considérer la représentation comme un blanc-seing accordé à quelques-uns, mais en même temps repenser les fondements de sa légitimité.
Paru dans la revue Les Nouvelles d’Archimède n°32