« Si je veux, j’ordonne ; ma volonté tient lieu de raison » : la formule en impose et illustre bien le volontarisme politique qui était censé servir de clef de voûte à la monarchie absolue. Mais celle-ci relevait, en réalité, du règne de l’imaginaire, puisque faire croire que le destin d’un pays puisse relever de la volonté d’un seul homme – fût-il le roi – revenait à entretenir la pire des superstitions. Pourtant, aujourd’hui, le volontarisme politique est de nouveau revendiqué comme une panacée. Que ce soit sur le plan économique ou politique – aller chercher la croissance économique « avec les dents », réaliser la rupture, etc. –, les « je veux » se multiplient, de manière obsessive, dans les discours officiels. Comme s’il suffisait de vouloir pour pouvoir… En proclamant que tout est possible, on commet un déni de réalité dangereux. Plus qu’une méprise sur la nature de l’action politique, ce volontarisme politique met au jour, jusqu’à la caricature, les travers de notre constitution actuelle. C’est pourquoi certains pointent une dérive vers une « monarchie élective ». Mais le volontarisme dont il est ici question ne fait-il pas planer une menace plus pernicieuse encore que celle d’une régression monarchique ?
Paru dans la revue Les Nouvelles d’Archimède n°48