Organiser une exposition d’art contemporain dans un musée départemental – fût-il celui de Gap – constitue un véritable défi. Les musées sont des espaces de sauvegarde et d’exposition d’un patrimoine, a fortiori quand ils revendiquent leur parenté avec ces lointains cousins qu’ont été les cabinets de curiosités. Espace public d’exhibition, le musée semble voué à oblitérer l’invention et à privilégier les filiations. Dès lors, entreprendre une exposition d’art contemporain dans un tel lieu ne peut que produire un télescopage entre la fascination pour les œuvres du passé et l’ouverture novatrice aux possibles, entre culture patrimoniale et créativité. La conception d’une telle exposition par Madame Verlinden – conservateur du Musée départemental de Gap – témoigne d’une authentique audace : créer un événement disruptif dans un lieu plutôt propice à garantir l’assurance tranquille de la durée. La différence fondamentale entre la conservateur de musée et le simple collectionneur apparaît ici saillante : le collectionneur fétichise les objets et cultive le passéisme, alors qu’avec le conservateur de musée – surtout quand il est en même temps commissaire d’une exposition -, le passé n’est pas momifié, mais porté à la présence. Parce qu’il est toujours prêt à modifier les critères de ses expositions, le conservateur inaugure sans cesse la possibilité de nouvelles interprétations. En organisant des correspondances entre les oeuvres, il les délivre chacune de leur passé propre et les rend déjà contemporaines les unes aux autres. Mais, en ouvrant ici toutes grandes les portes à l’art contemporain lui-même, le conservateur-commissaire d’exposition fait preuve d’une véritable hardiesse : il se fait le représentant d’une mémoire du futur, le gardien des promesses de l’art. Décidément, un musée n’est pas un mausolée. Continuer la lecture de Catalogue d’exposition d’art contemporain – Musée départemental de Gap
Archives mensuelles : août 2017
De la post-politique à la pré-politique
La critique de la post-politique est désormais un passage obligé pour ceux qui, dans la « gauche radicale », veulent en finir avec la « démocratie libérale ». Dans L’illusion du consensus, Chantal Mouffe a prétendu fournir un argumentaire de fond pour étayer cette dénonciation du « Zeitgeist post-politique » : en l’occurrence, la recherche du consensus en démocratie, au-delà du clivage entre droite et gauche. Or, cette recherche du consensus est l’objet de critiques convergentes de la part de l’extrême droite… Paradoxalement, les références théoriques invoquées par C. Mouffe entretiennent cette tendance au confusionnisme idéologique. Bien plus, en stigmatisant la post-politique, ses analyses justifient plutôt une régression dans la pré-politique.
Continuer la lecture de De la post-politique à la pré-politique