Tout indique, depuis les dernières consultations électorales, que la politique institutionnelle subit une crise aiguë. La désaffection qu’elle provoque se vérifie à la fois par la tentation de la contourner en votant aux extrêmes et surtout par l’abstention de plus en plus massive qu’elle suscite. A cela, il faut ajouter la défaite systématique des majorités sortantes, depuis vingt ans, qui confirme que les partis politiques qui incarnent les institutions semblent voués à l’échec. Il serait pour autant démagogique de voir dans ces phénomènes un rejet global de la politique au sens large. Voter pour un parti extrêmiste consiste le plus souvent à donner un sens protestataire à l’exercice de son droit civique ; s’abstenir volontairement et massivement de participer à une élection nationale doit être également interprété comme un événement politique qui témoigne de la crise de la représentation ; rejeter une majorité sortante correspond évidemment à une sanction politique significative. Aussi, ces trois phénomènes convergents ne sont pas le symptôme d’une nécessaire dépolitisation des citoyens, mais plutôt l’expression du rejet d’une certaine façon d’exercer la politique : en l’occurrence, celle de la politique institutionnalisée ou de la politique qui s’identifie avec les institutions. Dès lors, derrière la prétendue crise de la politique, il nous faut plutôt discerner une crise plus profonde des institutions elles-mêmes.
Paru dans la revue Les Nouvelles d’Archimède n°31